Éloge du futile
mardi 21 avril 2009
L'âme de la Russie éternelle
lundi 20 avril 2009
Vente Maison Martin Margiala - MMM
Vente Yves Saint Laurent - été 2009 - acte 2
dimanche 19 avril 2009
Le phénomène Susan Boyle
vendredi 17 avril 2009
Paris capitale de la mode
A lire cet article du Monde et à visiter cette exposition avec grand intérêt !
Louis XIV était une vraie figure de mode
LE MONDE | 13.04.09 |
obes à panier, costumes étincelants, accessoires, bijoux de corsage en diamants gouttes... On ressort ébloui et frustré de l'exposition du château de Versailles, consacrée à la façon de s'habiller dans les cours d'Europe, aux XVIIe et XVIIIesiècles.
Ebloui par la splendeur des atours, telle cette chasuble en fils d'argent et d'or du prince évêque Clément Auguste de Bavière, ou ce manteau de couronnement de George III d'Angleterre (en 1761), en velours rouge fourré d'hermine, avec sa traîne de 4,78 m. Frustré parce que aucun des 150 vêtements d'exception présentés sous les dorures de Versailles n'a appartenu à la cour de France.
La France n'a rien gardé de Louis XIV, de Louis XV, et des autres souverains... Ces chefs-d'oeuvre ont disparu", soupire Pierre Arizzoli-Clémentel, directeur du domaine national de Versailles et qui a imaginé cette exposition. Il se tourne néanmoins vers une robe claire brodée de plumes de paon, attribuée à la couturière Rose Bertin. "Elle pourrait, selon une légende, avoir été portée par Marie-Antoinette."
Pourquoi un tel vide ? "La tradition voulait qu'en fin d'année le roi donne au premier gentilhomme de la chambre, et la reine à sa première dame d'atours, l'essentiel de leur garde-robe, qui finissaient vendues au détail chez les fripiers parisiens", explique M. Arizzoli-Clémentel. La Révolution achèvera de disperser, voire de détruire, le vestiaire royal.
Pour explorer les fastes de l'Ancien Régime, Versailles n'a eu d'autre choix que de faire venir des tenues d'apparat d'Europe, notamment d'Angleterre, de Suède, du Danemark, d'Allemagne ou de la Russie des tsars, des pays où l'habit royal était "sacré".
UNE ROBE à 25 MÈTRES DE TISSU
L'exposition illustre, en revanche, l'influence décisive de la France en matière de mode. La silhouette la plus copiée par les cours européennes a été mise au point par Louis XIV. Sous son règne, le déploiement de magnificence atteint son comble, et tout un chacun, du moins quand on appartient à la noblesse d'Europe, voudrait égaler ou surpasser le Roi-Soleil.
Le monarque absolu, souhaitant être repéré à distance, met à la mode des bottines blanches à talon haut et semelle rouge, pour les hommes (une paire est exposée, venue de Dresde), ainsi que les parures de pierres précieuses qui, par leur éclat et leur abondance, symbolisent sa puissance. Ces ornements de cour, signe fort et même politique, peuvent mêler le vrai et le faux, tels des bijoux de théâtre.
Louis XIV est surtout l'auteur de l'habit à la française, qui impose trois pièces : gilet, veste et culotte. Il sera adopté par toutes les cours d'Europe et reste aujourd'hui la clé de voûte du vestiaire masculin. "Louis XIV a récupéré une forme d'habit très simple, le justaucorps à brevet, qui existait déjà pour monter à cheval. Il l'a mis à la mode en lui associant un signe de faveur", précise Pascale Gorguet-Ballesteros, conservatrice au Musée Galliera, qui a travaillé sur l'exposition. "Les quelques gentilshommes qui étaient autorisés à le porter pouvaient suivre le souverain sans lui en demander la permission."
Si Louis XIV est un prescripteur de mode hors pair, les artisans français - canuts de Lyon, dentellières de Calais, petites mains et joailliers, à Paris - ont si bonne réputation que les ambassadeurs vont passer beaucoup de temps à superviser les commandes de leurs souverains. Tel cet habit de noces du prince Gustave de Suède, réalisé en France, un costume en "pluies d'or et d'argent" au motif éblouissant : des soleils émergeant de nuages bleutés. C'est une pièce maîtresse de l'exposition. 40 ouvriers français, relate l'ambassadeur, y ont travaillé jour et nuit pendant 37 jours.
Les ambassadeurs mettent aussi amis et souverains à jour de la mode versaillaise. En témoigne ce croquis plié en quatre de Marie-Antoinette en habit à redingote, adressé par le comte de Fersen à sa soeur, la comtesse Piper.
Les concours d'élégance de Michelle Obama et Carla Sarkozy ne sont rien comparés aux rivalités des dames de la cour. Le grand habit féminin nécessitait 25 mètres de tissu avec son corsage en pointe, sa jupe à panier et la traîne, dont la longueur variait en fonction de l'importance de celle qui le portait. "Les dames devaient passer les portes de profil et apprendre, auprès d'un maître de ballet, à reculer avec leur traîne, afin de ne jamais tourner le dos à la reine", précise Pascale Gorguet-Ballesteros. "Il fallait éblouir pour s'imposer", résume Karl Lagerfeld, directeur artistique de Chanel, mécène de l'exposition."Même la cour française, la plus brillante et la plus imitée du monde, n'hésitait pas à s'endetter pour rester à la hauteur de la fascination qu'elle exerçait universellement."
L'exposition est plongée dans une lumière ténue, pour que les vêtements de cour ne se fanent pas. Chacune de ces tenues doit reposer dans l'obscurité un an par mois d'exposition. Nul ne les verra plus avant 2012. C'est une exposition unique qui ne voyagera pas.
Véronique Lorelle
Article paru dans l'édition du 14.04.09